mercredi 22 août 2012

jeudi 16 août 2012

Premières fois (III)

Filles.
Je n’ai jamais été en avance. La première fois que j’en ai rencontré une, je me souviens fort bien, j’avais quatre ans, je m’en souviens fort bien parce que je me suis dit: «J’ai quatre ans. Est-ce que les filles peuvent aussi avoir quatre ans?». C’est dire comme j’ai eu très tôt le sentiment de leur “étrangèreté”.
La deuxième fois j’avais cinq ans, la voisine était une blonde bouclée déjà rondelette, nous allions à la maternelle main dans la main. J’ai arrêté de la voir le jour où j’ai surpris une conversation de mes parents: «Ils ne sont pas bien tenus dans cette famille, elle a les pieds sales.»
(Ensuite se déroulent de longues années parce que, à cette époque, l’école communale n’était pas mixte.)
La troisième fois, j’avais dix ans. Nous étions une bande de joyeux copains de mon âge. Nous passions nos journées à la plage. Il y avait là une incroyable petite créature de quatre ans de moins que nous qui nous tenait sous sa coupe. Nous ne nous baignions que quand elle en avait envie. Elle nous ordonnait de creuser d’énormes trous et de bâtir des châteaux plus hauts que nous: nous déplacions des tonnes de sable. Nous aimions cela. Elle était notre chef de bande. Elle nous aurait ordonné de tirer les sonnettes, de crever les pneus, de commettre des cambriolages que nous lui aurions obéi comme des toutous.
Mes relations avec les filles avaient mal commencé.

lundi 13 août 2012

Premières fois (II)

Mer.
À l’âge d’un an et un mois j’ai découvert la mer. J’étais plus en avance que pour la montagne. Mes parents avaient loué une chambre dans une pension de famille au Touquet. Ils étaient partis avec un couple d’amis qui avait un garçon de mon âge. Gérard était un méchant, il me «torturait». Mais je ne me souviens pas, ni de ce séjour (il y a une photo). J’aurais d’autres choses à dire sur Gérard et bien d’autres choses sur la famille Soul ou Soûl ou Saoul (mais c’est une autre histoire…).
J’avais à peu près cinq ans lors d’une excursion à Dieppe en compagnie de mes grands-parents (deuxième fois la mer). J’ai retenu la pluie, les galets et un arrêt en gare de Char. Pourquoi ai-je retenu ce nom: Char?
À sept ans j’ai passé mes premières vraies vacances, à Tharon. Mon père avait acheté une auto. Il lui a fallu deux jours pour atteindre la côte atlantique, nous avons dormi à Ancenis. Je me souviens du château d’Angers. Cette forteresse formidable a marqué ma vie de diverses façons (mais ce sont d’autres histoires…). Je me souviens du tramway de Nantes, l’ancien. J’ai vu la mer pour la troisième fois. Le nom «Saint-Michel-Chef-Chef» me faisait beaucoup rire. Le bac de Mindin m’a impressionné (premier bateau). Mais surtout, là-bas, pour ramasser les ordures, il n’y avait pas de camion mais un cheval tirant un tombereau. Naquit ma première vocation: je voulus être éboueur.

dimanche 12 août 2012

Essai.

Ne pas attendre


«Vais-je avoir le courage d’avoir toujours devant les yeux le terme irrévocable pour remplir les jours qui peuvent encore m'être donnés de ce que je serai content d’avoir fait le jour sans lendemain où il sera trop tard pour faire ce que je n'aurai pas fait?»
[ponctuation respectée]
Yves Congar, page 577.


vendredi 10 août 2012

Premières fois (I)

Montagnes.
Toute mon enfance j’ai eu devant ma fenêtre la butte de Cormeilles-en-Parisis. À onze ans j’ai vu les Vosges, à quatorze ans j’ai gravi (par le train à crémaillère) la Rhune, à dix-sept ans (j’étais sérieux) je suis allé au sommet du puy de Sancy (par le téléphérique), à vingt-deux ans j’ai découvert le grand Morgon et le mont Guillaume, à vingt-quatre ans j’ai aperçu le Chamechaude. On peut dire que j’étais un garçon qui n’était pas en avance.